Un catamaran skimmer ça décolle. photo: Daniel La Salmonie

En préambule il convient de rappeler, qu’un bateau qui vole, cela existe: c’est un avion. En fait les bateaux volants trainent toujours quelque chose dans l’eau, cet élément 600 fois plus dense que l’air. Contrairement aux monocoques cela fait plus de 40 ans que les catamarans ont une coque régulièrement  en l’air. Ainsi; l’évolution actuelle vient pour une bonne partie des dingues du Classe C (2007) et de la volonté des techniciens de dépasser les règles mise en place lors de la dernière Coupe de l’América où les AC72 étaient censé ne surtout pas voler… Martin Fisher évoque le grand travail des faucheurs d’écume où la Coupe va se jouer pour une grande partie sur ces lames complexes qui fendent l’eau et s’opposent à la gravité.

Faire voler le plomb qui maintient les monocoques à l’endroit, c’est un autre sujet: une espèce de pierre philosophale moderne. Transformer un 4×4 en F1, demande en effet une foi à soulever des montagnes, tellement les efforts sont colossaux. Ce n’est pas pour rien que la course au poids est une constante en aviation. Au moins cela fera du spectacle et espérons-le: pas trop d’avaries ni de drames.

Archimédiens, skimmers et foilers

L’excellent article de Philippe Neiras permet de comprendre comment cela marche pour nos jouets plus accessibles. Archimédiens, skimming, full foiling définissent une nouvelle classification, c’est un point de départ indispensable avec des repères essentiels. Comme l’écrit Philippe Neiras: « les Archimédiens ne sont pas finis! ils restent les plus nombreux, les moins chers et procurent toujours autant de sensations; Les Skimming ne volent pas mais s’allègent, ils ont généralement des dérives courbes; Les Full foiling  encore appelés Flying Boat volent sur des foils ».

Les adorateurs du rating magique essaient de plaquer leur dogme sur ces engins, mais hormis l’arbitraire de pénalités,  cela a encore moins de sens que pour les catamarans classiques. Les écarts sont déjà monstrueux avec des supports identiques.

Plus ou moins facile c’est plus ou moins vite

On trouve les vidéos du skimmer  Nacra 17 mené en train de foiler. Cependant ce sont des artistes qui font ça. Sans appui à l’arrière percuter la vague est une suite logique et fréquente de la fin de l’accélération .  Si vous regardez les bientôt olympiens ils sont à plat et au ras du ras de l’eau. Si pour le même Nacra 17 la tendance pour les tops, était une incidence longitudinale (rake) forte par le calage admis dans la jauge, la tendance semble revenir vers des valeurs plus raisonnables permettant le délestage/accélération un peu moindre, avec un risque de wheeling mobylette  et donc de crash minimisé. Frimer comme sur la photo de l’article est toujours possible . Un Nacra 17 déboite un F18: plus bas, plus vite au portant, les accélérations sont fortes lorsque vous êtes sur le bon angle/vitesse. Pour ce faire la dextérité de l’équipage est mise à rude épreuve. C’est olympique papa.

A l’autre extrême de l’éventail de la pratique, on trouve le S9 de Bimare ou le Whisper fait par White. Les deux ont fait le choix de grande portance permettant un décollage facile et un contrôle du vol via un capteur terminé par un bouchon qui en rebondissant sur la surface de l’eau mesure la hauteur du vol et permet de régler le « rake » (incidence soit pigeon vole: l’avant monte, pigeon coule: l’avant descend) automatiquement. Ce qui permet de foiler sereinement, d’autant que les portances (avant et arrière) sont importantes. Qui dit portance dit trainée et là on freine le bestiau. Freiner est relatif car dépasser 20 noeuds est courant. Cela va  plus vite qu’un catamaran ordinaire.

Trois pattes ou quatre pattes ?

Le foiler à 3 pattes vont des ACxx au GC32 en passant par les Flying Phantom. Exigeants, excitants, très rapides ( + de 30 noeuds), ils sont optimisés pour la vitesse, rien ne traîne qui ne soit indispensable dans le complément du Ricard. Mais c’est pas facile en ligne droite et encore moins en terme de manoeuvres. Martin Fisher parle de « chorégraphie », sans rien exagérer. A l’empannage tu abats et le bateau te tombe dessus car le foil sous le vent pousse …

Ici l’évolution vers quatre pattes semble sportivement compréhensible. Comme l’explique Ferdinand van West à Martin Vanzulli, accepter de traîner le foil au vent dans l’eau freine la barque mais permet de simplifier considérablement les manoeuvres en restant plus aisément au-dessus de l’eau. C’est la solution retenu pour le Nacra 15 en version Jeux Olympiques de la Jeunesse  de 2018 où ce petit catamaran de sport sera le seul bateau présent à côté des planches et kite.

*Le titre est une allusion grossière à Edika. Que mon maître me pardonne.

En 2016: du beau sport, du plaisir et de la lisibilité/visibilité. photo: FT

2016 va être copieuse pour le top niveau du catamaran. JO, étape des ACWS en France, Mondial Hobie 16, Européen F18 à Brest, TFV,  seront parmi les points forts d’une saison sportive qui va de mars à novembre et dont les rendez-vous nationaux et internationaux sont nombreux.  Très nombreux. Trop nombreux ?

Du beau sport !

D’abord car c’est la santé. Plus sérieusement dans ce registre que nos camarades du classe A subliment la distinction volant/archimédien sans diviser cette belle classe de développement technique.

Que les Hobistes, Dartistes, Nacraistes, F18istes, F16istes, ClasseAistes, Phantomistes,  progressent et rapportent des podiums internationaux après de belles luttes à chaque bouée.

Que les sélections pour représenter le pays se gagnent en fonction des résultats sur l’eau, pour les JO et aussi chez les jeunes. Il est en effet assez surprenant qu’aucun (0)  des 8 finalistes de la Red Bull Foiling Generation n’ait été retenu dans la première fournée du beau projet Team France – Morbihan. Il est facile de comprendre que la fédération privilégie (7/10) les jeunes qu’elles recrutent dans ses structures dédiées aux monocoques. Mais régater à haute vitesse sur deux coques de n’improvise pas en quelques mois et les brillants jeunes locaux (3/10) pratiquants du catamaran retenus ne sont pas que des lièvres.

Que la spécificité de notre sport soit enfin reconnue et admise. Franck Cammas pour progresser en AC45 à choisi le Nacra 17 pas le 49er, ni le SB20 ou le Longtze. En observant de près Iker Martinez est un grand champion issu du dériveur moderne, mais il n’a pas la fluidité ni la glisse d’un Billy Besson ou d’un Jason Waterhouse. Le jeune australien de 24 ans est issu du Hobie Cat 16, d’un peu de F16/F18, a impressionné sur la dernière Youth America Cup avant d’emporter le test event de Rio devant Billy Besson/ Marie Riou. Il s’agit moins de hiérarchiser que de reconnaître les spécificités, l’identité d’une pratique qui reste ouverte.

Enfin, dernier voeu de cette rubrique que les jeunes filles et garçons qui pratiquent le catamaran de sport puissent avoir enfin un Championnat de France dédié  au moins de 25 ans sur lequel ils joueront sur des supports identiques.

Du plaisir

Que la température soit de 22° , la force du vent 15 knot sur la plupart des sorties. Que l’alanguissement dans la molle ou la montée d’adrénaline dans la baston soient librement consentie.

Que les parcours soient beaux, les lignes mouillées légèrement babord pour étaler la flotte et éviter la loterie du black flag. Que les jurys viennent sur les épreuves catamaran pour observer le fairplay sur l’eau et donc n’ayant rien à faire après ,  puissent boire des coups le soir avec les coureurs.

Que les bénévoles d’épreuves, les entraîneurs et parents  soient heureux du spectacle,  des performances et surtout des progrès des compétiteurs. Enfin que ces derniers s’éclatent dans le jeu de la régate  rapide.

De la lisibilité/visibilité

Que la retransmission des épreuves majeures soit ouverte le plus largement (Meheut oui, c+ possible).

Que les titres nationaux soient lisibles et prévisibles.

Que les formats novateurs et intenses du type du Bordeaux Cata Raid, de la Red Bull Foiling Generation ou des records locaux  deviennent la  composante forte et attractive  de notre sport comme l’a été le raid, il y a 25 ans.

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